Comment le sucre est devenu l’ennemi public numéro 1 ?

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Aujourd’hui, chaque individu consomme 35 kg de sucre par an. Crédit: Pixabay

« Une cuillère de sucre aide à avaler le médicament » disait Mary Poppins. Et oui, le sucre c’est doux, c’est bon et ça réconforte ! Et pourtant, consommé à trop forte dose, ses effets sont dévastateurs. Déprime, fatigue, diabète, obésité, cancers bref : le sucre est un vrai faux ami.   

« Nous sommes génétiquement prédisposés à aimer le sucre », explique Catherine Lefebvre. La nutritionniste publie le 1er mai 2017 « Sucre vérités et conséquences » dans le but de prouver que ces petits cristaux blancs sont mauvais pour la santé. « Plus on en ajoute dans les aliments, plus on s’accoutume à un certain niveau de goût sucré », poursuit-t-elle. Résultat : la dépendance s’installe petit à petit. En 2007, le chercheur Serge Ahmed, directeur du Centre National de la Recherche scientifique, va jusqu’à le comparer avec de la cocaïne. Dans ses expériences, il propose à des rats habitués à la cocaïne un choix entre la substance toxique ou de l’eau sucrée. Stupeur, les rats choisissent à plusieurs reprises le sucre. « Comme les drogues, le sucre active des neurones dans le cerveau qui procurent une sensation de plaisir et de récompense », remarque le scientifique dans un journal vidéo du CNRS. « A la fin de mon repas si j’ai pas mon carré de chocolat, je suis frustrée », avoue Laurence Vivalda à 52 ans, qui se reconnaît comme « accro au sucre ».

Comment en est-on arrivé là ?

En 1850, la population consommait 1 kg de sucre par an et par personne. Aujourd’hui, c’est près de 35 kg par an qu’ingurgite chaque individu ! Pour Serge Ahmed, l’explication est simple : la population est exposée 24 heures sur 24 au sucre. Il y en a de partout : dans tous les placards et dans tous les commerces. Il est bien loin le temps où il fallait attendre la bonne saison pour déguster un fruit bien sucré… Les gens ne mangent plus pour survivre mais pour le plaisir. Pour la nutritionniste Catherine Lefebvre, c’est l’apparition du sirop de glucose en 1850 qui a accéléré et banalisé la consommation de sucre. Issu du maïs et produit en quantité, l’industrie agroalimentaire s’en est très vite emparée. « C’est un ingrédient très abordable pour l’industrie alimentaire qui désire fidéliser sa clientèle. Le retour sur investissement est garanti », dévoile-t-elle. Autrement dit, le sucre est le moyen le plus rentable de s’assurer que les clients reviendront consommer puisqu’il est addictif ! À noter que le sirop de glucose n’est pas seulement présent dans les gourmandises… on en trouve aussi dans le jambon blanc industriel par exemple !

Comment diminuer sa consommation de sucre ?

Obésité, diabète, maladies cardiovasculaires, augmentation de la tension artérielle… les effets négatifs de la surconsommation de sucres libres sont bien connus. En début d’année, des chercheurs britanniques de l’université de Bath ont révélé que les personnes diabétiques ont un risque accru de développer la maladie de l’Alzheimer. Alors comment faire pour préserver sa santé ? Ça commence par la diminution des produits transformés ! Stop aux plats industriels cuisinés mais « D’abord et avant tout, il faut éliminer les boissons sucrées, incluant les jus de fruits de votre quotidien », prévient Catherine Lefebvre. Une canette de Coca-Cola contient 7 morceaux de sucre selon France info. Pour inciter la population à diminuer sa consommation de soda ou aux industriels à revoir leur recette, le gouvernement français prend des mesures en durcissant la « taxe soda ». Désormais, une boisson qui contient plus de 8 grammes de sucre pour 100 ml sera taxée deux fois plus qu’aujourd’hui. Pour l’auteure de « Sucre vérités et conséquences », «  Imposer une taxe sur ces produits, comme nous l’avons fait pour le tabac il y a plusieurs années, est une stratégie pertinente ». En 2015, la taxe instaurée sur les sodas à Berkeley en Californie a porté ses fruits : selon l’Association de la santé publique américaine, la consommation de boissons sucrées a diminué de 21% dans la ville au profit de l’eau.

Émilie Moulin