Violences conjugales : survivre, mais comment ?

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La violence conjugale est une atteinte à l’intégrité de l’autre dans une relation privée. © Sarah Durand

Depuis le début du confinement, les violences conjugales augmentent considérablement. De nombreux dispositifs ont été mis en place, par le gouvernement, mais aussi par des associations, pour tenter d’aider les victimes.

Le Covid-19 semble emporter dans ses bagages la frustration et la colère qui, une fois entrées dans les foyers, n’épargne personne. En France, les violences conjugales sont interdites par la loi : « Une ordonnance de protection peut être délivrée par le juge aux affaires familiales, comme cela était le cas avant le confinement« , explique Christine Guinard, juge des libertés et de la détention à Agen (47). « La priorité, quand nous avons ces cas qui se présentent, c’est d’éloigner l’accusé de la victime, ou de son domicile. Et encore plus du coup pendant ce confinement, on va lui demander de se confiner ailleurs. L’accusé passe devant moi pour que l’on s’assure de l’endroit où il va aller résider. S’il n’a nulle part où aller, il est possible que je le place en détention provisoire pour l’éloigner du domicile« .  La première étape : porter plainte. Sans avoir à appeler le commissariat ou à se déplacer immédiatement, elle peut se faire par courrier au procureur de la République ou par le dépôt d’une pré-plainte en ligne. « Par la suite, il faudra faire les constatations des violences physiques par un médecin légiste, et aller à une audition au commissariat« . Des sorties autorisées puisque : fuir n’est pas interdit pendant le confinement. La peur au ventre, la gorge nouée, les muscles tendus : c’est devenu le quotidien de nombreuses français.es depuis le début du confinement. Les violences ont augmenté de 30% en France depuis le 17 mars. Grande-Bretagne, Espagne, Turquie, Australie, Etats-Unis, Inde… Aucun pays n’échappe à la flambée du nombre de victimes de violences conjugales.

Des mesures gouvernementales insuffisantes

Depuis le domicile, il est possible de contacter le 3919, numéro du gouvernement joignable dans le cas de violences faites aux femmes. « Il fonctionne de nouveau sur des plages horaires définies, mais il a été complètement à l’arrêt pendant la première semaine de confinement ! » Chloé Madesta fait partie du mouvement féministe des « colleuses« . Avec ses « soeurs » de lutte elles affichent, ou affichaient, des slogans dans tout Paris et dans toute la France. « On est la 5 ème puissance mondiale et la ligne a été interrompue pendant une semaine ! » La jeune femme parle vite et fort, elle répète les mots « une semaine« . Elle est énervée. Le gouvernement a aussi annoncé la mise en place d’un code. Pour se signaler comme victime de violences conjugales dans une pharmacie, il suffirait de dire les mots : masque 19. Chloé rigole : « C’est une mesure complètement superficielle. Les victimes ont besoin de personnels formés à leur prise en charge. Là, c’est donner une responsabilité immense à des personnes qui sont déjà débordées à cause de la crise sanitaire. » Alors les colleuses se sont mobilisées à leur façon : « C’est du bricolage, mais on relaie les appels à l’aide des femmes qui souhaitent fuir leur foyer. Et on essaie de leur trouver des places dans des appartements inoccupés… » Au bout du compte, à ses yeux, il n’y a qu’une seule solution, et les colleuses la demande depuis bien avant le confinement : « Il faut des moyens, il faut former les équipes de police, ajouter des lits et des hébergements. La chose qui manque à la lutte aujourd’hui, c’est l’argent ! Le gouvernement doit réagir. » 

Les associations multiplient les initiatives pour trouver des solutions

Maître Astrid Desagneaux est la présidente de l’association des Femmes Huissiers de Justice de France. Via une adresse mail* les victimes peuvent entrer en contact avec elle : « En confinement, c’est très difficile de téléphoner avec le conjoint à côté, donc à l’écrit, c’est plus facile. » Après avoir passé les étapes difficiles du dépôt de plainte, des constatations et des interrogations, la victime de violences conjugales est lancée dans une bataille judiciaire avec son agresseur. C’est là que l’AFHJF entre en action : « En fonction de la région où elles habitent elles sont orientées vers des huissiers à proximité, qui peuvent se déplacer pour faire des constatations de sms, ou bien des retranscriptions de mails. Après cela, ce sont des preuves en justice ! » Une étape primordiale qui peut donc s’effectuer pendant le confinement. L’association le propose gratuitement. « Depuis le début de la crise, j’ai énormément de demandes ! » Plusieurs autres associations agissent dans cette lutte. En avant toutes a lancé un tchat en ligne anonyme pour permettre aux victimes de se confier et d’être accompagnées. Nous Toutes lance un visuel de prévention à placarder dans les immeubles et dans les commerces de proximité avec les numéros utiles. Un objectif commun : faciliter l’assistance psychologique, juridique, et sociale des victimes de violences conjugales.

*L’adresse mail de l’association des Femmes Huissiers de France : afhg.fnsf@scp-desagneaux.com

Affiche « Nous Toutes » ©NousToutes lien pour la récupérer : https://drive.google.com/file/d/1WYCVZE9zPfp7QR42EKOeyecN3coY8DLj/view

« En Avant Toutes » : tchat anonyme accessible de 10h à 21h 7jours/7 sur le lien : https://commentonsaime.fr

Logiciel Pages ©AD

« Nous Toutes » poste tous les jours des informations et des numéros utiles pour les victimes et témoins de violences sur la page Instagram de l’association.

Le site : https://formdivers.typeform.com/to/trk4U9/ L’association propose aussi en ce moment des formations en ligne sur les violences sexistes et sexuelles au sein du couple.