Liberté, Animalité, Humanité

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Corinne Bouvot avant le référendum pour les animaux. ©Facebook Corinne Bouvot

Le 29 septembre dernier, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a mis fin à la reproduction des dauphins et des orques dans les delphinariums. Une petite victoire pour Corinne Bouvot, militante au Groupe Anti-Captivité (GAC).

Comment est né votre engagement auprès des animaux et la nécessité de fonder le GAC ?

J’ai toujours aimé les animaux et j’ai grandi avec eux. Étant petite, je voulais devenir vétérinaire mais j’étais nul en maths. Facebook m’a ouvert les yeux sur beaucoup de choses effroyables faites aux animaux et j’étais paralysée par tout ce que je voyais. Je suis devenue végétarienne puis végétalienne, et dès 2013 j’ai commencé à manifester devant Marineland. Mais avec deux autres amis militants nous nous sommes rendus compte que l’on avait beaucoup plus à communiquer sur ce sujet. Alors on a créé un groupe Facebook et des stickers « non à la captivité » que l’on vendait pour pouvoir mobiliser les citoyens. Ça a eu un succès incroyable et en 2018, plus motivés que jamais, nous avons décidé de faire des actions sur le terrain qui sortent de l’ordinaire, comme de grands happenings, pour sensibiliser les gens de manière différente.

Pourquoi avoir centré vos actions sur Marineland Antibes ?

On dénonce la captivité de manière générale mais pour les actions de terrain, nous avons voulu nous concentrer sur ce qu’il y avait de plus proche. En outre cette question de proximité géographique, Marineland reste aussi le seul parc d’Europe a avoir des orques, or ce sont des animaux qui subissent très mal la captivité. Et puis même si Marineland est notre cible privilégiée, le groupe ayant prit une ampleur nationale, on lance aussi des cyber-attaques contre d’autres delphinariums en France. 

Vous attaquez Marineland Antibes sur la privation de liberté dont subissent les animaux, mais avez-vous d’autres griefs contre l’entreprise ?

La privation de liberté est une forme de maltraitance, que l’on soit humain où non-humain. C’est une maltraitance psychologique. De plus la taille des bassins ne permet pas aux animaux de répondre à leurs besoins physiologiques car ils ne peuvent pas assouvir leur besoins primaires. Les parois en verre répercutent les ultra-sons émis par les cétacés pour communiquer et brouillent leur ouïe. Les animaux sont sous tranquillisants. Certains animaux présentent même des troubles du comportements, comme l’ours polaire qui ne fait que tourner en rond toute la journée. Les animaux qui font les spectacles sont contrôlés par la nourriture et s’installe alors un rapport de soumission entre l’homme et l’animal. Néanmoins, ceux qui s’occupent des animaux, les dresseurs, les aiment vraiment. Il y a un lien qui se tissent entre eux. C’est juste qu’ils les aiment mal.

Avez-vous des sources et des preuves pour affirmer cela ?

Il y a des gens du groupe qui s’infiltrent de temps en temps et qui rentrent dans le parc car il est important d’aller voir ce qu’il s’y passe et de savoir de quoi on parle. Moi-même je m’y suis rendue il n’y pas très longtemps. Mais nous avons aussi des sources internes (dresseurs et soigneurs), mais il s’agit de contacts un petit peu plus hasardeux. Mais bon je pense que s’il y a des infos qui nous arrivent aux oreilles c’est que cela a été évoqué d’une manière ou d’une autre. C’est comme ça que l’on a su que l’entreprise voulait exporter quatre orques dans un parc en Chine, même si le directeur a ensuite publié un démenti.

Le GAC, Groupe Anti-Captivité, lors d’une manifestation. ©Facebook GAC

Peut-on par ailleurs voir Marineland comme un centre d’éducation au monde marin, protégeant des espèces menacées ? 

Je ne crois pas du tout au rôle altruiste de Marineland. On ne sauve pas une espèce en la capturant. Il y a une différence entre un rôle de conservation et un rôle de préservation. Ce qui est bien c’est ce qu’ils font avec les tortues, les soigner pour ensuite les relâcher, mais bon il faut savoir qu’ils en gardent. De plus, le parc est seulement à 200 mètres de la mer Méditerranée et celle-ci offre bien plus de richesses marines et même si c’est plus rare, on peut y observer des dauphins et des orques en total liberté.

Comment évolue la mobilisation à votre cause ?

Elle devient de plus en plus importante. Il y a une vrai prise de conscience. Il y a six ans, lorsque l’on a commencé, nous n’étions que 19 et les automobilistes nous insultaient quand ils passaient devant nous en nous disant que ça ne changerait jamais. Désormais les gens sont beaucoup plus sympas et nous sommes entre 80 et 100 militants en moyenne sur chaque mobilisation. De plus, les gens présents sur le groupe Facebook viennent de la France entière. Les gens n’ont plus envie de ce rapport là aux animaux, et d’ailleurs le parc a de moins en moins de clients.

Vos actions de terrain ont-elles un impacte sur les instances locales, régionales voire nationales (Mairies, gouvernement…) ? 

Ceux qui dirigent Marineland tiennent compte de nous, même s’ils ne le diront jamais. Ils font maintenant attention à la façon dont ils communiquent avec nous, même s’ils ne sont toujours pas ouverts aux discussions et qu’ils continuent de chercher à nous décrédibiliser en faisant par exemple croire que l’on envoie des menaces de mort à Monsieur Picot (le directeur général de Marineland). Nous sommes le premier maillon de la chaîne et nos actions ont peu de chance de faire aboutir les choses. Mais d’autres associations qui existent depuis plus longtemps et qui sont au niveau national comme One voice, avec qui nous sommes partenaire, ont plus de chance de faire bouger les choses et de faire en sorte que la France prenne de véritables engagements. Il s’agit d’ailleurs d’un des seuls pays d’Europe où les représentations de cirque avec des animaux sauvages sont encore autorisées.

Lili Claudet