« Il faut sauver notre Terre ! »

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Agnès Curnier, 51 ans, responsable du commerce La Nature et Vous

Actuellement le bio se développe de plus en plus, mais la question sur son avenir et celui des petits commerçants reste en suspension. Agnès Curnier, responsable du commerce La Nature et Vous – situé à Manosque – en dit plus sur sa vision de l’agriculture biologique.

Pourquoi vous est venue l’idée de travailler dans un commerce d’agriculture biologique ?

« Je ne suis pas entrée dans ce milieu par rapport au bio. C’est le côté commerçant qui m’a beaucoup plu en réalité, je m’y suis fait très vite. J’ai aussi beaucoup appris par moi-même en lisant, en allant sur internet. C’est comme ça que j’en suis arrivée là. La vente en bio est vraiment particulière car d’abord, nous n’avons pas à faire à des gens lambda, mais à des personnes qui ont des convictions. En grande surface, les gens sont pressés et ne font pas forcément attention à la mise en rayon, rare est le client qui entre en posant des questions. Nous échangeons énormément avec notre clientèle, nous sommes toujours en train de leur recommander ou de leur expliquer des produits. D’ailleurs nous avons des habitués, et certains en sont même devenus de bons amis !»

 
Qui sont vos fournisseurs ?

« Il n’y a pas un choix énorme sur les fournisseurs même si nous proposons de tout (alimentaire, cosmétique, littérature…). Sur le département du 04 (Alpes-de-Haute-Provence), il y a 3 sociétés grossistes en bio : Relais Vert, Vita Frais et Bio Cash. Au niveau local, nous proposons du sirop, du miel, des pommes, des pâtes à tartiner, des pâtés végétaux ou encore de la viande. Ce sont donc de gros fournisseurs, mais également des petits agriculteurs. Nous les choisissons en fonction des produits. Pour les agriculteurs locaux, nous ciblons particulièrement les produits que les clients ne trouveront pas ailleurs. Nous cherchons à nous démarquer des autres en proposant des produits orignaux. »

 
Que recherche votre clientèle ?

« La clientèle que nous avons aujourd’hui est ce qu’on appelle « les nouveaux bios », c’est-à-dire que ce sont des gens issus de la GMS (Grande et Moyenne Surface) et qui veulent trouver en bio ce qu’ils trouvent en grande surface. Ils ne sont pas forcément intéressés pour des raisons éthiques. Les gens se penchent davantage sur le bio car c’est meilleur pour la santé, cela donne une « bonne » apparence, mais également parce que le médecin leur a conseillé de faire attention à leur alimentation. »

 

Pourquoi le bio est-il plus cher que les produits dits « traditionnels » ?

« Nous n’avons pas forcément de difficultés financières plus importantes qu’une grande entreprise. Le prix du bio varie en fonction des saisons ou encore des remises. S’il est plus cher c’est car premièrement en France, nous ne sommes pas énormément achalandés au niveau des agriculteurs biologiques, alors nous sommes obligés de travailler notamment avec l’étranger (Allemagne, Angleterre…). Deuxièmement, la main d’œuvre coûte cher en raison de l’absence d’utilisation des désherbants par exemple. En effet les producteurs n’utilisent pas de carburants et donc pas d’engins, ils font tout à la main y compris le désherbage. Cela prend donc énormément de temps, ce qui se répercute sur les prix. Et troisièmement, nous sommes énormément contrôlés en bio, notamment avec le cahier des charges où devons respecter les normes de production. Par exemple, le producteur doit attendre 2 ans pour avoir le statut de sol « bio », cela s’appelle la conversion. Ou encore, il faut fournir des preuves quant à la non-utilisation de produits chimiques pour les étangs.»

 
Trouvez-vous que la concurrence se développe dans votre domaine ?

« Au niveau local, les gens ont bien compris que le bio pouvait rapporter de l’argent. Il y a donc du potentiel et forcément, la concurrence arrive. Au niveau national, c’est impressionnant ! Les grandes surfaces ouvrent partout en France. Si elles n’ouvrent pas, c’est parce qu’elles sont trop petites en surface et n’ont pas les épaules assez larges. Je pense qu’il y aura des répercussions plutôt positives sur les agriculteurs qui seront de plus en plus nombreux à se lancer dans le bio, malgré les difficultés au niveau des conventions (notamment pour l’attente). »

 
Quelles sont les conséquences de la crise agricole dans votre secteur ?

« Normalement, en bio nous ne devons pas être concernés par la crise agricole car nous sommes censés avoir une éthique. C’est-à-dire que le paysan qui va fournir le produit est payé à sa juste valeur. En bio, nous sommes censés faire de « l’équitable ». Le crise n’a donc fait aucun dégât. Du moins, je n’ai entendu parler d’aucune répercussion particulière.»

 
Selon vous, quelles sont les tendances à venir concernant la culture écologique?

« S’il y a du changement, je ne pense pas que ce sera pour des raisons d’éthique. Les gens s’intéressent au bio de plus en plus notamment pour des raisons de santé, ils prennent de plus en plus conscience que beaucoup de choses ne vont pas. S’ils avaient travaillé leur alimentation depuis tout petit voire même depuis la grossesse, il n’y aurait pas tous ces problèmes d’allergies ou d’enfants hyperactifs. Mais je pense que cela viendra avec le temps. »

 

Quel est selon-vous l’avenir de l’agriculture biologique et de ses petits producteurs ?

« Selon moi, celle-ci va progresser et progresse déjà. Il y en a déjà beaucoup plus qu’il y a 20 ans où on n’avait aucun producteur local. Alors j’ai vraiment espoir qu’il y aura de plus en plus de bio pour les générations futures. Il faut sauver cette Terre, pas la détruire. »

Anaïs Grand