J’ai cherché le sens de la vie chez les scientologues

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La scientologie revendique 12 millions d’adeptes dans le monde dont 45 000 en France. CP : Flickr

Largement popularisé par Tom Cruise, le mouvement crée par Ron Hubbard dans les années 50 intrigue tout autant qu’il fait peur. En France, la scientologie, ou « l’étude de la connaissance », reste bien loin du rayonnement qu’elle peut avoir aux Etats-Unis. Quelques adeptes et églises sont tout de même présents sur le territoire, toujours à la recherche de nouveaux membres potentiels.

 

A première vue, l’Eglise de scientologie pourrait être confondue avec une pharmacie. Murs blancs, inscriptions vertes et large vitrine exposant plusieurs livres, l’endroit a même l’air banal. Une banalité qui provoque presque une certaine déception. Il faut dire que quand on a jamais mis les pieds dans ce genre d’endroit, on ne sait pas vraiment à quoi s’attendre…

Le hall est grand, une sorte d’open space où personne ne semble travailler réellement. Très loin de la secte hyper-renfermée à laquelle on peut s’attendre. Sur un mur, un panneau d’inscription à une réunion sur le thème des droits de l’Homme compte déjà une vingtaine de noms. Sur les cinq personnes présentes, toutes ont plus de la cinquantaine. Certains prennent leur café, ou discutent simplement.  

« Je peux vous aider ? », me demande alors une dame âgée derrière le comptoir de la réception. Dès qu’elle a entendu le mot, « renseignement », celle-ci a foncé appeler Charles*, un adepte du mouvement depuis 25 ans. Cheveux blancs, pull en laine et lunettes rondes, on est plus proche de papy Brossard que d’un éventuel gourou fanatique. Tant pis, ou tant mieux.

Je prends alors le rôle d’un étudiant en fac d’éco un peu paumé dans sa vie. Le genre de mec au cœur brisé, mal dans sa peau et qui n’a plus foi en rien. Et ça marche. « J’ai besoin de repères », comme je le confie timidement à cet homme dont je ne connais absolument rien. « 21 ans (ce n’est pas mon vrai âge), c’est le moment parfait dans une vie pour commencer. Moi, je m’y suis mis vers quarante ans, et j’ai rajeuni physiquement et mentalement », rétorque-t-il presque instinctivement.

Théoriquement, et comme le site internet de la scientologie le mentionne en page d’accueil, le mouvement accepte et tolère tout le monde. « C’est avant tout une étude sur soi-même » affirme Charles. Inévitablement, un test de personnalité gratuit (c’est important de le souligner) de 200 questions m’est distribué. De « mangez-vous lentement », à « considérez-vous avoir de bons amis », tout y passe. Je prétexte alors le besoin de le remplir dans la tranquillité pour éviter les longues minutes de réponses et de lecture.

Puis la discussion s’engage. Selon Charles, la scientologie a vraiment changé sa vie sur tous les plans, notamment grâce aux nombreux cours (payants) qu’il a suivi, et qui lui ont permis de « s’élever spirituellement ». D’ailleurs, ça tombe bien que je sois ici, clame-t-il. Des cours sur l’économie, c’est tout à fait le genre de chose que l’on peut apprendre dans leurs locaux. « L’économie aujourd’hui, elle n’existe plus. Les banques s’achètent de l’argent entre elles, ce n’est pas ça la vraie économie. » assure-t-il toujours très sûr de lui.

A en croire le scientologue, il ne faut pas se fier à la majorité des gens : « Les journaux et la télévision éloignent les gens de la réalité. Certains nous mettent à l’écart car ils savent que nous sommes plus proche de la vérité. » Mais qu’importe, car Charles sait « reconnaître les mauvaises personnes, ceux qui ont des mauvaises intentions et qui mentent » , en se basant notamment sur leur « degré émotionnel ». A part pour mon prénom, j’ai menti sur toute la ligne.

Après m’avoir montré tout un tas de livres de Ron Hubbard, fondateur du mouvement, « qu’il faut lire plusieurs fois » et des DVD inspirés de ces mêmes livres, il conclut : « On pourrait parler toute la journée, mais ce n’est pas le but, il faut que tu vois ça par toi-même. »

 Si lui a trouvé un sens à sa vie entre des murs qui rappelle la salle d’attente d’une clinique et une odeur de café permanente, ce ne sera pas mon cas.  En me raccompagnant, il n’oublie pas de me demander quand est-ce que je rapporterai le test. « Bientôt, mais c’est compliqué en période de partiels. »

*Le prénom a été modifié.

Romain Boudon